Face à l’érosion côtière ou au recul du trait de côte (RTC) qui s’accélère avec le réchauffement climatique, l’État a renforcé les moyens d’action des communes littorales exposées. Selon le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), 20 % des côtes françaises reculent et les départements de la Vendée et de la Loire-Atlantique, en région Pays de la Loire, ne sont pas épargnés. Toutefois, face à cette menace qui plane au-dessus de milliers de biens immobiliers dans les prochaines décennies, des dispositions existent qui visent à anticiper et gérer ce phénomène inéluctable qui concerne désormais cinq cents communes françaises.
Le décret n°2024-638 du 27 juin 2024 précise les modalités d’application du droit de préemption spécifique créé par la loi Climat et résilience d’août 2021. Ce dispositif permet aux communes et aux intercommunalités d’acquérir des biens immobiliers menacés par l’érosion côtière afin de les renaturer avant leur disparition ou d’en autoriser un usage temporaire compatible avec leur niveau d’exposition. Ce droit s’applique automatiquement dans les zones identifiées comme menacées dans 30 ans. Pour les zones menacées dans 30 ans à 100 ans, les collectivités peuvent l’instaurer par délibération. Ce pouvoir peut également être délégué aux établissements publics fonciers, dont les missions ont été renforcées par la loi Climat et résilience.
Selon les études du Cerema, environ un millier de bâtiments résidentiels et commerciaux pourraient être touchés par le recul du trait de côte dans les cinq prochaines années, représentant une valeur immobilière d’environ 240 millions d’euros. À l’horizon 2050, ce sont plus de 5 200 logements et 1 400 locaux d’activité qui pourraient être atteints par ce phénomène, pour une valeur estimée à 1,2 milliard d’euros.
L’ordonnance du 6 avril 2022 a créé un nouvel instrument juridique : le bail de longue durée pour l’adaptation à l’érosion du littoral. Ce contrat permet à une personne publique (État, commune, établissement public) de consentir des droits réels immobiliers à un preneur dans les zones exposées au RTC. D’une durée comprise entre 12 et 99 ans, ce bail est défini en fonction des prévisions d’évolution du trait de côte. Il peut être prorogé si l’évolution du phénomène le permet, mais sa reconduction tacite est impossible. En cas de danger imminent pour la sécurité des personnes, le bail est résilié de plein droit. Cet outil locatif permet d’envisager une occupation transitoire des terrains menacés, tout en garantissant leur renaturation à terme. À l’échéance du bail, le terrain fait l’objet d’une remise en état naturel, comprenant la démolition des constructions et les opérations de dépollution nécessaires.
Pour les diagnostiqueurs immobiliers qui prennent en charge la réalisation des états des risques avant vente ou location, ces évolutions législatives impliquent une responsabilité accrue dans l’information des acquéreurs et des locataires sur le risque RTC. L’état des risques, document obligatoire contenu dans le dossier de diagnostic technique (DDT), doit absolument mentionner les informations relatives à l’érosion côtière, une démarche qui contribue à une meilleure transparence du marché immobilier dans ces zones sensibles.